Deux femmes interpellées au premier jour de la loi contre le voile intégral
Deux femmes en niqab ont été interpellées devant la cathédrale Notre-Dame de Paris, dans la cadre d'une manifestation contre la loi interdisant le port du voile intégral à compter de ce jour.
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AFP - L'entrée en vigueur de la loi interdisant le port du voile intégral a été marquée lundi par le coup d'éclat de femmes en niqab et de sympathisants interpellés devant Notre-Dame pour y avoir manifesté sans autorisation, le gouvernement prévenant que la loi controversée serait appliquée.
Deux femmes en niqab, une femme voilée - dont le visage n'était pas caché - et un militant associatif ont été interpellés devant la cathédrale de Paris devant des dizaines de journalistes, pour avoir participé à une manifestation non déclarée rassemblant une dizaine de personnes contre la nouvelle loi du 11 octobre 2010 interdisant le port du voile intégral.
Parmi eux, Kenza Drider, 32 ans, en niqab brun et beige, arrivée d'Avignon en train le matin, pour participer à des émissions de télévision.
Elle a raconté devant la presse que la loi était "une atteinte à (ses) droits européens", et qu'elle les appliquerait "en tant que citoyenne française", niant toute "provocation".
Mme Drider a précisé que si elle était "verbalisée", "la loi s'appliquera, (elle) prendra l'amende", mais qu'"en tant que citoyenne française", elle sera "dans l'obligation de faire un recours devant la Cour européenne des droits de l'homme".
"On est resté trois heures et demie au commissariat de police à attendre ce que le parquet allait délibérer. Trois heures et demie après on nous a dit: +c'est bon, vous pouvez sortir+. Donc on a eu droit à aucune amende ni quoi que ce soit", a déclaré Mme Drider, jointe par l'AFP à la sortie du commissariat.
"On nous a laissé sortir, on a eu ni amende pour le niqab ni pour quoi que ce soit", a-t-elle ajouté, en affirmant avoir pensé que le rassemblement organisé devant la cathédrale Notre-Dame avait été dûment déclaré auprès de la préfecture.
"Je suis rentrée avec (le niqab dans le commissariat, ndlr) et des femmes policières m'ont demandé dans un coin de m'identifier. Je me suis identifiée (en le relevant, ndlr) et je l'ai rabaissé tout juste après", a-t-elle encore dit.
Selon la police, l'interpellation n'était pas liée au port du niqab.
"Il ne s'agissait pas d'interpeller ces gens sur la base du port du voile", mais bien pour "non respect de la déclaration de manifestation", a raconté Alexis Marsan, commissaire divisionnaire à l'ordre public.
L'organisateur du rassemblement, Rachid Nekkaz de l'association Touche pas à ma constitution, a de son côté affirmé à l'AFP avoir été "interpellé en compagnie d'une amie en niqab" devant l'Elysée. "Nous voulions nous faire verbaliser pour port du niqab, mais la police n'a pas voulu nous dresser un PV", a-t-il dit.
Depuis lundi, le port du niqab ou de la burqa n'est plus autorisé dans la rue, les jardins publics, les gares, les commerces ou les mairies, en vertu de la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage.
En France, il y aurait environ 2.000 femmes intégralement voilées, selon diverses estimations.
Certains musulmans sont opposés à la loi. Samedi, 61 personnes ont été interpellées, dont 19 femmes voilées, après avoir tenté de prendre part à un rassemblement à Paris, à l'appel d'un collectif d'associations islamistes.
La loi sera "infiniment difficile à appliquer" et "infiniment peu appliquée", a dit Manuel Roux, secrétaire général adjoint du Syndicat des commissaires de police. "Très clairement, ce n'est pas aux policiers d'aller faire du zèle", a-t-il déclaré sur France Inter. Ceux qui croiseront une femme voilée feront "de la pédagogie", essaieront "de la convaincre", a-t-il déclaré.
Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a toutefois prévenu que la loi "sera respectée", même si son application est difficile. "La police et la gendarmerie sont là pour appliquer la loi et elles appliqueront la loi", a-t-il déclaré en marge d'un déplacement à Luxembourg.
Le ministre a adressé ses instructions aux préfets le 31 mars et des consignes ont été données aux forces de sécurité, pour éviter tout dérapage.
"Dans le cas où une personne refuse de se prêter à un contrôle (...), les conséquences de ce refus devront lui être exposées et notamment la possibilité, si elle persiste, de la conduire dans des locaux de police ou de gendarmerie pour y procéder à une vérification d'identité", précise la circulaire.
La député européenne Eva Joly (Europe Ecologie-Les Verts) a estimé que la loi s'inscrivait "dans une politique de stigmatisation de l'islam".
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