VENEZUELA

Quand un marchand de glaces refroidit le gouvernement vénézuélien

Le glacier Coromoto de Mérida détient le record du nombre de saveur de glaces différentes.
Le glacier Coromoto de Mérida détient le record du nombre de saveur de glaces différentes. Wikimedia Commons, JoséMa Orsini

Les autorités vénézuéliennes ont vivement réagi, lundi, à la décision du célèbre glacier Coromoto, qui figure au Guinness Book des records, de fermer boutique à cause d’une pénurie de lait. Le pouvoir dénonce une manipulation.

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La glace n’est que la partie émergée de l’iceberg et le gouvernement vénézuélien l’a bien compris. Le ministère du Tourisme a dû, très officiellement, répondre, lundi 29 décembre, à un marchand de glaces de la ville de Mérida qui avait annoncé être obligé de fermer pour la période des fêtes de fin d’année.

Ce glacier, la célèbre enseigne Coromoto qui figure au Guinness Book des records pour ses 850 variétés de sorbets, avance, sur sa page Facebook, qu’elle ne peut plus travailler en raison d’une pénurie de lait.

C’est cette raison invoquée par le commerçant qui a donc fait réagir le gouvernement de Nicolas Maduro. "Malgré la tentative de manipulation de la part d’un grand nombre de médias nationaux et internationaux et de la pancarte mise sur la devanture du marchand Coromoto, les autres revendeurs de la ville de Merida reçoivent de plus en plus de résidents et de touristes car ils n’ont aucun mal à trouver la matière première pour faire leurs sorbets", assure un article publié sur le site du ministère du Tourisme. Le texte est même accompagné de plusieurs photos d’amateurs en train de savourer leur péché mignon glacé.

Indice de rareté des biens

N’est-ce pas là se donner beaucoup de mal pour quelques cornets ? Pas pour le pouvoir vénézuélien qui se montre très sensible par rapport aux pénuries de biens de consommation courante. C’est en effet un sujet récurrent qui a déjà mis par le passé le gouvernement dans de mauvaises postures.

En mai 2013, le président Nicolas Maduro avait été obligé d’ordonner l’importortation en urgence de 50 millions de rouleaux de papier toilette pour soulager une population qui n’arrivait plus à en trouver. Cet épisode avait été largement exploité par les opposants au pouvoir en place, notamment les conservateurs nord-américains, pour tourner en ridicule le régime bolivarien.

Le lait et le papier toilette ne sont pas les seuls biens que les Vénézuéliens peuvent avoir du mal à se procurer. La banque centrale du Venezuela dispose même d’un indice de rareté pour les produits de consommation. En mars 2014, date de la publication des dernières données officielles, il était de 29 %. C’est-à-dire que pour 29 types de produits sur 100, les "consommateurs risquent de devoir faire le tour des boutiques et grandes surfaces avant d’en trouver", explique le chaîne britannique BBC.

Marché noir ou faillite du système ?

Les autorités mettent régulièrement ces pénuries sur le compte du marché noir. Comme le prix d’une partie des biens de première nécessité - comme le lait - est plafonné pour permettre aux plus pauvres d’y avoir accès, certains en achèteraient en grande quantité pour les revendre dans les pays voisins au prix du marché. Le pouvoir estime que jusqu’à 40 % de certains biens sont ainsi exportés par des petits malins, rappelle la BBC.

Les opposants à Nicolas Maduro ont, bien sûr, une toute autre lecture de la situation. Pour eux, ces pénuries sont le symptôme de la faillite du système vénézuélien qui, d’après les agences de notation, est au bord du dépôt de bilan. Le contrôle étatique des prix ne pousserait pas, d’après ces détracteurs, les entreprises locales à produire certains biens. Du coup, tout repose sur les importations. Or comme l’inflation annuelle avoisine les 65 %, les sociétés importatrices ne seraient pas incitées à se procurer les produits de première nécessité car elles ne peuvent pas ensuite répercuter l'inflation sur le prix facturé au consommateur.

L’État lui-même peut de plus en plus difficilement intervenir directement pour remplir les étals. Il est, en effet, très dépendant des exportations de pétrole. Mais avec la baisse continue des prix de l’or noir, la rente pétrolière diminue d’autant, limitant les marges de manœuvre du pouvoir.
 

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