Première rencontre entre Castro et Obama depuis le dégel
Raul Castro et Barack Obama doivent apparaître ensemble vendredi soir à l'occasion du Sommet des Amériques. Une image forte qui doit entériner le rapprochement entamé entre les deux pays en décembre dernier.
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La grande puissance américaine et la petite île cubaine toutes deux réunies autour de la même table. Pour la première fois depuis 1959, des présidents américain et cubain, en l'occurrence Barack Obama et Raul Castro, vont se trouver face à face, aux côtés des 33 autres États américains, lors du Sommet des Amériques, les 10 et 11 avril à Panama, consacrant ainsi le rapprochement historique des deux ennemis de la Guerre froide. Cuba sera présent à ce sommet pour la première fois depuis la création de ces rencontres, voilà 21 ans.
« Je peux confirmer que le président Obama a parlé mercredi [au téléphone] avec le président Castro, avant que le président Obama ne quitte Washington", a annoncé un responsable de la Maison blanche vendredi. Pour autant, si aucune annonce n'est attendue pour l'instant, ni aucun entretien bilatéral programmé entre les deux chefs d'État, et si, surtout, les sujets de discussion lors de ce sommet ne devraient pas concerner ce réchauffement historique, reste que l'affiche est belle.
"C'est un rendez-vous pour l'image", relève Stéphane Wiktowski, président de l'IHEAL [Institut des hautes études de l'Amérique latine], interrogé par France 24. "On est dans l'affichage politique et médiatique, dans le domaine du symbolique et non pas dans celui de la négociation qui permettrait d'achever la normalisation des relations entre les États-Unis et Cuba." En décembre dernier, Washington a annoncé le rétablissement – encore non effectif – des relations diplomatiques avec La Havane, interrompues depuis 1961.
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Le déplacement de Barack Obama prouve qu'il n'entend plus "persévérer dans une voie qui ne donne rien", comme l'ont fait ses prédécesseurs, souligne Stéphane Wiktowski. "Le dossier Cuba est important pour Obama, même si ce n'est pas sa priorité, c'est un dossier avec lequel il peut marquer l'Histoire."
Déjà, en décembre 2013, lors d'un hommage ultra-médiatisé à l'ex-président sud-africain Nelson Mandela, une poignée de mains furtive entre Barack Obama et Raul Castro, alors qualifiée d'historique, avait éclipsé, l'espace d’un instant, le défunt leader.
La concrétisation du "Somos todos americanos" d'Obama
Les retrouvailles de Barack Obama et Raul Castro devraient par ailleurs concrétiser la stratégie du président américain par rapport à l'Amérique latine. "Obama a pris conscience de son éloignement diplomatique vis-à-vis de l'Amérique latine. Jusqu'à présent, les Américains ne souhaitaient pas participer à des sommets en compagnie de Cuba. Or, les Cubains sont de plus en plus présents et Obama s'est senti isolé", ajoute Stéphane Wiktowski. "Cuba est devenu un acteur incontournable sur la scène régionale."
Cuba a notamment pris la présidence en 2013 de la Célac [Communauté d'États latino-américains et Caraïbes], qui rassemble tous les pays du continent américain à l'exception des États-Unis et du Canada. De plus, Moscou et Pékin lorgnent sur cette île soumise à un embargo américain. En juillet 2014, le président russe Vladimir Poutine s'est d'ailleurs rendu à Cuba, où il a signé avec Raul Castro plus d'une dizaine d'accords, notamment concernant l'exploration pétrolière. Quelques jours plus tard, la Chine a elle conclu 29 accords dans le cadre de sa coopération économique avec La Havane.
itLa stratégie d'Obama avait déjà été exposée lors de son discours adressé au peuple cubain, le 17 décembre 2014, au cours duquel il avait lancé "Somos todos americanos" ["Nous sommes tous Américains"]. "L'Amérique latine n'avait jusque là pas été une priorité pour Obama. Le président américain ne s'était même jamais rendu de sa vie dans un pays d'Amérique latine avant d'être élu président pour la première fois. Mais aujourd'hui, les choses changent." Et cette stratégie paie : selon un sondage réalisé à Cuba, 80 % des habitants ont une opinion très favorable du président américain.
La route est toutefois encore longue vers la "normalisation" entre les deux États, qui sous-entend au préalable un rétablissement complet des relations diplomatiques entre La Havane et Washington. Ce rétablissement est soumis à diverses conditions, au premier rang desquelles figure le retrait de Cuba de la liste des pays soutenant le terrorisme, établie par Washington. Jeudi 9 avril, Barack Obama a pourtant affirmé qu'aucune décision en ce sens n'avait encore été prise.
Cuba a de son côté jugé incomplètes et insuffisantes les mesures prises par le président américain pour assouplir l'embargo des États-Unis sur les transactions économiques et financières de l'île.
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