A Hong Kong, des jeunesses paramilitaires parfois très politisées
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Hong Kong (AFP) –
Les Hongkongais n'ont pas d'armée. Mais ceux qui souhaitent apprendre à marcher au pas et crapahuter dans la jungle peuvent rejoindre des groupes paramilitaires de jeunesse de plus en plus populaires.
Certains s'inspirent de la tradition militaire de l'ancienne puissance coloniale britannique. Et beaucoup n'ont d'autre ambition que la forme physique de la jeunesse.
Mais au moment où le territoire s'apprête à célébrer les 20 ans de la rétrocession, et alors que certains critiquent une influence chinoise de plus en plus prégnante, des voix s'inquiètent de la récupération politique de certains mouvements.
C'est surtout le cas pour l'Association des cadets de l'armée de Hong Kong (HKACA), dont les membres portent des uniformes verts qui rappellent étrangement ceux de l'armée chinoise.
Sur son site internet, l'HKACA se présente comme un groupe formant à la discipline et aux exercices à pied pour "cultiver une volonté de fer(...) l'unité et la vigueur".
Ce mouvement est né en 2015, quelques mois seulement après les immenses manifestations pro-démocratie qui avaient paralysé le centre de Hong Kong.
Son commandant en chef n'est autre que l'épouse de l'actuel chef de l'exécutif Leung Chun-ying, considéré par certains comme une marionnette de Pékin. Et parmi ses parrains figurent l'Armée populaire de libération (APL) et le bureau de liaison de la Chine à Hong Kong.
- 'L'histoire réelle' de Hong Kong -
Le territoire du sud de la Chine n'a pas d'armée. Sa défense est assurée par l'APL qui dispose d'une garnison dans le centre ville mais est très discrète.
L'APL ne recrute qu'au sein de la population de Chine continentale et n'a pas le droit de se mêler des affaires intérieures hongkongaises. Mais certains élus locaux se demandent si elle n'est pas derrière la formation et le financement des cadets.
Le président du HKACA, Bunny Chan, a démenti ces spéculations.
Mais l'organisation a refusé de répondre aux questions de l'AFP.
Pour le politologue Ma Ngok, le HKACA a sans doute davantage un but d'éducation patriotique qu'un objectif militaire. L'idée serait de répandre la parole de Pékin.
En 2016, en réaction à la création des cadets, "Passion civique", groupe politique anti-Pékin, avait lancé son propre mouvement de jeunesse versant dans le paramilitaire.
La Page Facebook de ce groupement, "Passion Teens Squad", compte 1.900 abonnés et dit vouloir faire la promotion de l'entraînement physique et de "l'histoire et la culture réelles" de Hong Kong.
Un des formateurs du mouvement, qui se fait simplement appeler Wan, a expliqué à l'AFP qu'il proposait de la randonnée, de l'orientation et des formations aux techniques de survie.
"Nous résistons à d'autres groupes de jeunesse liés à la Chine", annonce-t-il.
- Forger la personnalité -
D'autres organisations, en revanche, mettent un point d'honneur à ne pas verser dans l'idéologie.
Ce samedi, dans un camp reculé de Sai Kung, dans le nord-est de Hong Kong, des jeunes enchaînent les marches, les exercices d'escalade de murs tout en communiquant par talkie-walkie.
Bienvenue au Hong Kong Adventure Corps, une organisation qui compte 4.200 membres, créée par des anciens de l'ex-Régiment royal de Hong Kong, lequel dépendait de l'armée britannique mais a été démantelé avant la rétrocession.
Tang Chi-shing, 12 ans, reconnaît qu'à son arrivée il y a un an et demi, il n'était pas fan. Mais il s'est accroché.
"Cette organisation est une des plus dures de Hong Kong", dit-il fièrement en expliquant que ces sessions mensuelles en tenue de camouflage et béret, où il découvre la lecture de carte ou la descente en rappel, lui ont notamment appris à ne plus avoir peur de ses professeurs.
Matthew Wong, le directeur du groupe, s'inspire de son expérience au sein des forces britanniques. Il rejette tout objectif politique.
"Notre but n'est pas de former des soldats, mais de forger des qualités personnelles".
A en croire l'historien Kwong Chi-man, de nombreux Hongkongais inscrivent leurs enfants dans ce type de mouvements parce qu'ils sont convaincus qu'ils les aideront à renforcer leur confiance en eux.
"S'ils estimaient qu'il y avait une dimension idéologique à ces organisations, je pense que la plupart des parents ne les inscriraient pas", juge ce professeur de l'Université baptiste de Hong Kong.
© 2017 AFP